Pour une offre hospitalière de qualité dans les Côtes d'Armor - Sénateur Gérard LAHELLEC

Pour une offre hospitalière de qualité dans les Côtes d'Armor

Pour une offre hospitalière de qualité !

 

 

 

 

Interpellation du directeur de l'ARS Bretagne sur les projets de restructuration hospitalière dans les Côtes d'Armor

 

Je me permets de vous écrire afin de solliciter auprès de vous un échange au sujet de la mission menée par Monsieur Rosetti qui entend évaluer la pertinence territoriale de l’offre de soins du secteur, défini par le périmètre constitué par les hôpitaux de Guingamp, de Lannion, de Paimpol et de Tréguier, afin de la restructurer.

 

S’il ne saurait être question de mettre en doute l’expertise de celui qui s’est illustré au sein d’un grand groupe de travaux public gestionnaire d’infrastructures et dont personne ne conteste les compétences en matière d’optimisation économique de l’organisation des déplacements, j’aimerais cependant, en tant que sénateur des Côtes d’Armor, porter à votre attention ma réflexion au sujet de l’offre hospitalière dans le département et ce, à deux titres. D’une part, je me fais ici le relais de l’extrême inquiétude de la population et des salariés du groupement hospitalier, qui m’ont sollicité. D’autre part, il s’agit d’un sujet que je connais bien, m’étant particulièrement engagé il y a quelques années pour aboutir à une fusion entre l’Hôpital Public de Guingamp et la Clinique Privée dans le but d’une utilisation commune du plateau technique.

 

Tout d’abord, il convient d’observer que le seul compte rendu de cette mission a consisté à convier quelques parlementaires à une visio conférence de présentation des bonnes intentions des pouvoirs publics en matière d’organisation sanitaire sans qu’ils aient été interrogés sur leur perception de la situation vécue par les populations. Répondre aux besoins des populations et des territoires par une politique de santé publique de proximité apportant des garanties, telle devrait être l’objet premier de toute mission de cette nature.

 

Deuxièmement, il me semble nécessaire de rappeler le contexte global dans lequel s’inscrivent les travaux de la mission. La covid a mis en lumière un constat que plus personne ne conteste désormais : il faut réarmer l’hôpital et prendre enfin en compte de manière sérieuse les problèmes de plus en plus aigus de démographie médicale qui touchent les habitants de notre région. L’absence de prise en compte de ce contexte aurait pour effet de générer un climat délétère, alimenté par les débats relatifs à l’obligation vaccinale implicite, parmi les personnels de santé et aussi chez les patients.

 

Troisièmement, cette réalité renforce l’impérieuse nécessité de définir ce que devrait être un hôpital de proximité. En effet, le croisement des données caractérisant la géographie du territoire concerné et les évolutions démographiques met en lumière qu’en l’absence de capacité pour chaque établissement de pouvoir assurer l’universalité des actes médicaux de premiers niveaux, ce serait toute la vie du territoire qui serait affectée. Il conviendrait sûrement ici de veiller à ce que l’on n’amalgame pas la distance et le temps ni ne sont pas absolument corrélés. On observera ainsi, par exemple, que pour la partie sud du Trégor, l’hôpital de référence est Lannion mais lorsque la référence devient Tréguier pour certaines prestations, le temps de transport pour s’y rendre est multiplié par deux.

 

En ce qui concerne les centres de Saint-Brieuc et de Paimpol, je souhaiterais attirer votre attention sur la situation démographique et médicale de ces communes. Le décret du 20 mai 2016 prévoit qu’un hôpital de proximité réponde à deux critères parmi lesquels, celui de desservir un territoire présentant une part de population âgée de plus de 75 ans supérieure à la moyenne nationale (9,1% selon les chiffres de l’Insee) et une part de médecins généralistes pour 100 000 habitants inférieure à la moyenne nationale (330,7 selon la nouvelle cartographie interactive du CNOM). Or, les personnes de plus de 75 ans représentent 12,5% de la population de Saint Brieuc, 21,8% de celle de Paimpol et le territoire des Côtes d’Armor est le département où le nombre de médecins généralistes est le plus bas de Bretagne (139 pour 100 000 habitants en janvier 2019), et de surcroît, en baisse. Dès lors, il me semble que toute restructuration devrait en tenir compte.

 

Enfin, s’agissant du Centre hospitalier de Guingamp-Pabu, il convient de rappeler ici l’attachement exprimé par la population à la pérennisation de l’activité de la maternité. S’il est vrai que cette pérennité est nécessairement liée aux nombres d’actes médicaux et à la démographie médicale nécessitant un certain nombre de praticiens spécialisés, il ne me semble pas que le problème sera résolu par une fermeture du site, ni par l’abandon de l’exigence d’affectation de praticiens, ni même par la construction d’un établissement nouveau qui deviendrait une « coquille vide », nullement compensée par une quelconque commodité routière le rapprochant d’un autre établissement. Pour ma part, je ne conçois pas que l’on puisse envisager une construction neuve pour réduire, mais au contraire, pour développer !

 

 

 

 

 

 

Entretien avec le directeur de l'ARS

 

En m’inscrivant dans le cadre des diverses et multiples initiatives engagées pour défendre notre système de soins et le service public hospitalier, Monsieur le directeur de l’ARS Bretagne a bien voulu, à ma demande, m’accorder une audience qui s’est déroulée ce lundi 8 novembre 2021 à Rennes. J’avais associé ma collègue Annie Le Houérou à cette démarche, retenue cependant par la commission des affaires sociales du Sénat se réunissant le même jour pour débuter l’examen du projet de loi de finance de la sécurité Sociale.

 

Au cours de cette rencontre qui a duré près de 2 heures, nous avons pu mesurer l’ampleur du problème auquel est confronté notre système de soins en général et l’hôpital public en particulier. L’ampleur des engagements financiers annoncés par le gouvernement consécutivement au « Grenelle de la santé » claque comme un aveu : les approches comptables qui tendent à conclure qu’il faudrait réaliser encore des économies de la dépense publique sont en total décalage avec la reconnaissance des besoins à satisfaire pour parvenir à un système de soins digne du 21 ème siècle. Le déficit cumulé de nos hôpitaux qui découle de plusieurs facteurs (Tarifications, recouvrements, etc) ne doit donc pas constituer la référence pour engager de nouvelles coupes sombres tandis que le dit Ségur de la santé devrait s’accompagner d’un changement de « logiciel » afin de définir ce qu’il y a lieu de mettre en œuvre. En vérité, c’est l’ensemble du système hospitalier qui est concerné et la démographie médicale est aujourd’hui telle que l’on assiste à une pénurie de praticiens (médecins, infirmier-e-s, aides soignant-e-s…).

 

Dans ce débat, je n’ai pas manqué de rappeler qu’il n’est pas possible de bâtir une réponse aux besoins de santé sur la base d’une pénurie de personnels soignants ; Malgré un état de tension extrême, un déficit abyssal, des personnels usés et en souffrance, notre hôpital tient bon et la population en a grandement besoin. En effet, j’ai relevé en évoquant ce sujet que beaucoup d’éléments convergeaient dans cette direction.

 

Je n’ai pas manqué de rappeler aussi le combat de toute la population pour la sauvegarde de la maternité de Guingamp et pour la préservation de la chirurgie ! Dans sa réponse sur ce point, M Le Directeur a été on ne peut plus clair :« Il faut, en toute hypothèse, maintenir un plateau chirurgical à l’hôpital de Guingamp ». S’agissant de l’avenir de la maternité, aucune décision n’est pour l’instant arrêtée. Les entretiens d’évaluation en cours parmi le personnel ne signifient nullement, selon M Le Directeur, qu’une décision quelconque de fermeture serait arrêtée. En revanche, il invite la population et les élu-e-s à réfléchir au taux de fuite découlant du choix de certaines femmes d’accoucher dans un autre établissement. Ce taux est estimé à 50% par l’administration de l’ARS. Il m’a semblé important de souligner ici que les élu-e-s peuvent bien sûr jouer un rôle essentiel de promotion de la maternité mais à condition d’avoir l’assurance de sa pérennité !

 

L’idée qui ressort de l’entretien est celle d’un projet de territoire. Il nous revient d’en faire un véritable projet porté par une grande ambition publique. Chaque acteur de ce territoire, usager, personnel, et élu local doit être associé à cette réflexion sans exclusion. La question est moins d’envisager un autre hôpital que de confirmer le plateau technique, la maternité et la chirurgie, à Guingamp. La question territoriale est un critère à partir duquel on peut renforcer l’existant en créant des synergies et des coopérations permanentes qui nous sortiraient des logiques comptables et RH une fois la question du manque de personnels traitée.