À propos des « terres rares »

29 mai 2025

Le 28 mai, au Sénat, avait lieu un débat sur les Terres rares et matériaux critiques…

Evoquer les terres rares et les extractions conduit spontanément à penser aux conditions d’extraction, à la situation sociale des êtres humains qui l’assurent et aux risques que comporte cette activité du point de vue de l’émergence de tentations colonialistes qui pourraient encore caractériser le monde. Mais les terres rares sont aujourd’hui essentielles dans la fabrication de produits de hautes technologies.

Dans le contexte actuel, l’enjeu des terres rares revêt à mes yeux une portée industrielle et une implication géostratégique de premier ordre, la Chine contrôlant leur exploitation en écrasant la concurrence étrangère et en assurant 90% de la production mondiale.
Ce contexte de rareté et de déséquilibre constitue une situation critique à plusieurs égards :
1 – La concentration de la production de la fourniture peut en faire une arme géopolitique.
2 – L’usage toujours croissant des éléments rares peut avoir une incidence directe dans les industries technologiques.
3 – Enfin, à ce stade de nos connaissances techniques et scientifiques, nous ne connaissons pas pour l’instant d’autres matériaux substitutifs.

Certes, la Chine est richement dotée et la Chine fait peur. Mais sachons quand même nous rappeler que sa domination dans l’exploitation est aussi l’aboutissement d’une politique industrielle à long terme… dont les effets sont multiples. La Chine a su maintenir un large réseau de raffinage des matériaux bruts, amenant aujourd’hui de nombreux producteurs sur la planète à y exporter leurs minerais. La Chine a par ailleurs déposé davantage de brevets dans les terres rares que l’ensemble du reste du monde réuni. La conquête ou la reconquête d’une grande ambition industrielle me semble donc constituer un enjeu de première importance.
Dans le même temps, l’explosion incontrôlée du développement du numérique et autres data constitue une pollution d’un type nouveau, dont il conviendra de réguler l’essor.

En France, les principaux sites géologiques susceptibles d’être exploités pour des terres rares sont situés en Bretagne, en Guyane et en Polynésie.
En Bretagne, des gisements existent en Ille-et-Vilaine, dans les Côtes-d’Armor et dans le Finistère. Ils sont trop modestes pour justifier l’ouverture d’une filière d’extraction, mais, en cas d’envolée des cours, certains sites pourraient alimenter un complément de production.
En Guyane, des permis de recherche ou d’exploitation sont accordés pour des « bouquets » de minerais qui comprennent des terres rares.
Sur toute la chaîne de valeur des terres rares, la France et l’Europe sont dans un rapport de dépendance marqué par rapport à la Chine. La situation peut même être qualifiée d’instable et de dangereuse face aux possibilités de restriction de la Chine sur ses exportations à base de terres rares, en raison de la hausse prévue de la consommation chinoise.

Il existe néanmoins des ouvertures pour l’Europe pour diminuer cette dépendance : potentiel d’exploitation minière de terres rares dans l’Arctique européen, perspectives de recyclage, en particulier des aimants permanents, passage aux technologies de supra-conduction. Ces stratégies permettraient de retrouver une part de souveraineté si elles étaient toutes les trois menées à leur terme, et pas seulement l’une ou l’autre.
Si pour les Occidentaux la Chine « fait peser des menaces sur la sécurité nationale », son discours est qu’elle « investit ». S’il est « très bien » de vouloir développer des chaînes d’approvisionnement indépendantes de la Chine, il est également peu probable que cela se fasse à court ou moyen terme.
S’agissant des garanties dont il conviendrait de s’assurer en matière d’extractions et de traitements des terres et des éléments rares, permettez-moi de rappeler ici l’excellente mission initiée il y a quelques mois par nos collègues du Groupe Centriste au Sénat, concernant l’exploration des abysses et autres grands fonds marins, objets eux aussi de grandes convoitises !

La qualité du rapport sur lequel a débouché la mission est un indicateur de connaissance universel précieux. Il ne nous est donc pas interdit de nous en inspirer !


Le 19 février étaient réunis à Plouaret les élus municipaux des communes des cantons de Belle Isle en Terre, de Plouaret et de Plestin les Grèves